L’émotion suscitée autour d’Apple par la mort de Steve Jobs le démontre : dans un environnement aussi bousculé que celui que nous connaissons, la marque, surtout lorsqu’elle est incarnée par un personnage aussi charismatique que Steeve Jobs, constitue un ciment émotionnel d’une force inégalée. Mais encore faut-il respecter quelques règles à l’instar de la firme de Cupertino.
Des évolutions fortement déstabilisantes.
Les changements que connaissent aujourd’hui la plupart des marchés questionnent le business model de nombreuses entreprises. Les secteurs traditionnels sont remis en cause par l’irruption de nouveaux acteurs. La valeur se déplace du « produit » au « service », comme l’a récemment illustré la volonté de Leo Apotheker de recentrer HP sur son activité logicielle (en 2010, le « hardware » ne représentait pourtant déjà « plus » que 52% de ses ventes).
D’après une étude réalisée en juin 2011 par le cabinet de conseil en stratégie HTS Consulting auprès de 33 grands groupes européens, 75% des collaborateurs interrogés n’ont aucune certitude quant à l’évolution du périmètre d’activité de leur entreprise d’ici à 10 ans. Ils ont le sentiment que leurs dirigeants peinent à communiquer leur stratégie d’innovation et de développement… si cette dernière existe réellement !
Avoir des repères stables devient une nécessité pour les clients comme pour les collaborateurs.
L’étude réalisée met en exergue le fait que la « marque » constitue un des principaux points de repères dans les périodes de changement (69% des personnes interrogées) car elle a 3 fonctions principales:
– Sa fonction première est celle de la « sécurité ».
Pour 83 % des personnes interrogées, elle « réduit le risque » de se tromper lorsqu’on achète un produit ou que l’on envisage de devenir salarié d’une entreprise. Ainsi, la force historique de l’image de marque d’Apple fut un élément clef du redressement de l’entreprise dans les années 2000.
– Son deuxième moteur est celui du « désir». Pour 76 % des personnes interrogées, le « désir », renforcé par l’expérience est un pilier de la fidélité à la marque. En ayant réussi à créer des objets, qui au-delà de la technologie sont des objets de mode (l’Iphone et l’Ipad), en créant des lieux d’expérience avec l’Apple Store, Apple a su parfaitement mettre en œuvre ce principe au cours des 5 dernières années. Dans un tout autre secteur, le positionnement de LVMH à la 26eme place du classement mondial et à la première place des marques française au « BrandZ Top 100 Most Valuable Gobal Brands 2011» (voir le document plus bas) n’est sans doute pas étranger à ce phénomène.
– Enfin, la marque est garante de l’identité de l’entreprise/du produit en renvoyant aux actes fondateurs, voire mythiques de l’entreprise.
Avoir fait du parcours de Steve Jobs un mythe savamment entretenu relève de cette logique. C’est aussi le cas de Virgin, Nouvelles Frontières ou Hermès qui restent des symboles forts d’anticonformisme, de liberté ou de tradition (67 % des personnes interrogées).
Selon l’étude d’HTS Consulting, pour 72% des personnes interrogées, lorsqu’une une marque remplit pleinement ces trois fonctions, elle constitue un important levier de fidélisation pour ses clients et ses collaborateurs, avant même le prix des produits ou le niveau de rémunération. C’est alors que l’on voit se former spontanément des fans clubs, ou des communautés d’utilisateurs.
Pour que cela fonctionne, quelle stratégie mettre en œuvre ?
Les plus belles réussites reposent sur la capacité à aligner l’ensemble de l’entreprise (offre, culture d’entreprise, organisation, processus…) avec les attributs de la marque.De façon plus ou moins consciente, toutes les décisions structurantes se prennent au travers de ce prisme. Au-delà d’Apple, la récente success story de Zappos aux Etats Unis est la parfaite illustration de cette règle.
Le respect de ce principe peut amener à la création d’une structure séparée de l’activité historique (le choix de Toyota de créer Lexus illustre cette approche)… ou pas. La première option permet d’éviter de « polluer » la marque historique avec des combats qui ne sont pas les siens. A l’inverse les extensions de marque réussies d’Apple (Mac, Ipod, Iphone, Ipad, Itunes…) permettent de capitaliser sur la force de la marque mère.
Trouver la bonne combinaison est vital car une marque est un « ;organisme vivant »;. Ses ressorts sont l’innovation, la cohérence et la clarté du positionnement.
L’émotion autour du décès de Steve Jobs le démontre de façon magistrale, bien managée, la marque devient une véritable icône pour ses clients comme pour ses collaborateurs. Cela sera sans doute la dernière leçon de marketing du maître de la Hi-Tech…